lundi 28 juin 2010

Changement climatique : Questions/Réponses

Le changement climatique fait aujourd'hui grand débat. Même si les mentalités changent, de nombreuses questions restent en suspend.

Je vous fais donc passer la vidéo présente sur universcience.tv , où Hervé Le Treut, climatologue, directeur de l'IPSL (Institut Pierre Simon Laplace), et Luc Abbadie, écologue, directeur du laboratoire Biogéochimie et écologie des milieux continentaux, Ecole normale supérieure (Paris) et enseignant à Paris 6, discutent sur le débat climatique.

Les deux hommes parlent des difficultés auxquelles fait face la science pour prévoir le changement et l'identifier, donnent quelques pistes avec des résultats d'études, et mettent en avant des idées de réponses concernant ce changement climatique.
Voici donc un débat de spécialistes, adressé à tous !


Le changement climatique contesté à tort ?Le changement climatique contesté à tort ?

Avec Hervé Le Treut, climatologue, directeur de l'IPSL (Institut Pierre Simon Laplace), et Luc Abbadie, écologue, directeur du laboratoire Biogéochimie et écologie des milieux continentaux, Ecole normale supérieure (Paris).





Pour aller plus loin, allez faire un tour sur le blog Prisme de tête !!

dimanche 20 juin 2010

Ocean 2010

L'écologie est devenue très à la mode ces dernières années, pour le meilleur et pour le pire. Année de la biodiversité, 2010 a montré l'interêt grandissant des individus pour la cause écologique, mais aussi les (trop) nombreuses entraves à la protection des écosystèmes sur Terre.
La principale difficulté avec l'écologie, c'est de comprendre les échelles de temps utilisées. En raison de la formation de notre cerveau et de notre courte espérance de vie, les systèmes de pensée humains sont focalisés sur de courtes échéances. Au contraire, en écologie, les changements sont observés parfois au court terme mais aussi souvent au long terme. Mais comment réaliser que des changements s'oppèrent quand on ne les voit pas? Comment convaincre la population que les océans se dégradent, que les papillons désertent, que la forêt amazonienne disparait à une vitesse effrayante, quand tout semble si stable au regard de chacun.
C'est le grand défi du combat écologique, changer d'optique, changer d'échelle, et comprendre comment les systèmes évoluent pour les comprendre. Dans ce but, je vais résumer et présenter ici une étude publiée dans Science en 2006, montrant comment l'état des Océans s'est dégradé ces dernières années, et comment cela influe sur nous en retour.

L'océan, c'est aujourd'hui l'une des sources de biens la plus importante pour l'humanité. En premier, celui-ci apporte une source essentielle de nourriture à des millions de personnes dans le monde. La bonne santé de l'océan garantit emplois, qualité de l'eau, stabilité de l'environnement, etc aux habitants de la côte. Et bien sûr, la valeur économique des océans est juste énorme.
Pourtant, depuis le début de l'ère industrielle, nous n'avons cessé de détruire les écosystèmes marins. Surpêche, pollution et destruction d'habitats ont participé à une dégradation globale des écosystèmes marins et donc à une diminution des services naturels que nous procure la nature.
Par exemple, prenons les écosystèmes côtiers. Les scientifiques ont suivi la biodiversité et les services tirés de la nature sur une période de 1000 ans. Pour ce faire, ils ont suivi 12 écosystèmes différents avec des populations de 30 à 80 espèces importantes économiquement et écologiquement. Les résultats sont clairs. Un déclin brutal et continu apparait à partir de l'industrialisation de notre civilisation. A tel point que 91% des espèces sont en "chute" (déclin supérieur à 50% par rapport à l'abondance basale), 38 sont "effondrées" (déclin à plus de 90% de l'abondance basale) et 7% sont éradiquées.


Ecosysèmes marins côtiers : Pourcentage de taxons (groupes d'êtres vivants) effondrés (ronds noirs) ou exterminés (triangles blancs) en fonction du temps (A). En (B) on trouve le pourcentage de stocks de pêche effondrés en fonction de la richesse en espèces du milieu. On voit que plus la zone est riche en espèces, moins il y a d'effondrement des stocks : Une zone riche en espèces subira moins fortement une pêche intensive car le système est plus stable.

Bien sur, un tel déclin a des conséquences importantes sur le fonctionnement des écosystèmes et sur les services rendus par la Nature. Dans un premier temps, on peut noter la réduction de 33% des populations de pêche viable, ensuite on a la réduction à 69% des habitats servant de nurseries jeunes de chaque espèce, comme les rochers à huitre, les couvertures d'algues et les zones humides. Et enfin on note la baisse (-63%) de la filtration et détoxification de l'eau par les organismes animaux et végétaux.

Les uns affectant les autres, on a donc une augmentation globale des risques, comme les marées rouges (prolifération d'algues, parfois toxiques), une perte importante de la biomasse en poisson, la diminution de l'oxygène dans l'eau (zone morte), une augmentation des inondations (due en partie à la montée des eaux, mais aussi au fait que la végétation ne protège plus les berges et donc facilite l'action des vagues). Et la liste n'est pas exhaustive ! C'est dire...

Ces différents tableaux présentent les pourcentages de changement sur le millénium des paramètres étudiés. Par exemple la partie "biodiversité" résume les changements en appauvrissement, effondrement , extinctions, et restauration des stocks, par rapport à un taux basal. A coté, on a les changements dans les services donnés par la nature en fonction du taux de base, et à droite les changements dans les risques.

Et on retrouve la même chose globalement dans le grand large. Les scientifiques se sont intéressés à 64 grandes zones (>150 000 km²) sur 53 ans (1950 à 2003), produisant sur cette période 83% des biens de pêche du monde. Globalement, on a une accélération du taux d'effondrement des populations, en 2003, 29% des espèces sont considérées comme effondrées (c.a.d que le taux de capture est en dessous de 10% de la meilleure capture faite). Ca fait très mal !


En A, on a le pourcentage de taxons effondrés, sur 53 ans. Les triangles représentent les effondrements stricts, alors que les losanges prennent en compte les restaurations. Les triangles ou losanges bleus représentent des zones pauvres en diversité d'espèces, et les rouges des zones à forte diversité. Comme vu précédemment, les zones naturellement riches sont plus résistantes aux changements que les zones pauvres. En B on a une carte des 64 zones étudiées avec en couleur la richesse spécifique (bleu : faible, rouge : forte).

En bref, que ce soit sur les côtes ou au large, l'action de l'être humain a impacté très fortement et négativement la biodiversité marine et le fonctionnement des écosystèmes. Cependant, les scientifiques ne sont pas alarmistes. En effet, des zones particulièrement dégradées ont subi des plans de sauvetage avec une protection totale de la zone. Le résultat est un regain rapide et efficace de la biodiversité, avec un retour des fonctions des écosystèmes. Mieux, grâce à ces écosystèmes en restauration, le taux de pêche dans les alentours a été amélioré (car les zones protégées servent de pouponnières et permettent à la zone de lentement se repeupler). Par ailleurs, les zones de tourisme subissent des booms économiques en raison du bon état des fonds marins et de la diversité des espèces qui attirent immanquablement les touristes.

Donc la conlusion, c'est qu'il faut prendre en compte la nature, son fonctionnement, sa dynamique, pour l'utiliser à son maximum. L'avenir nous réserve de grandes difficultés stratégiques. En effet, avec une population humaine grandissante et hautement consommatrice, nous nous devrons de gérer nos ressources alimentaires au mieux, et protéger les écosystèmes afin de profiter de leurs fonctions naturelles de détoxification, de provision de biens etc. Ce n'est pas réélement ce qui est en ce moment fait par les gouvernements et les puissances de ce monde, mais tôt ou tard, nous n'aurons plus le choix que de nous moderniser dans notre façon de penser les choses, et de modifier notre système afin de garantir la survie des futures générations et améliorer la vie des contemporains.

Source :
Worm B., Barbier E.B., et al., (2006) Impacts of biodiversity loss on ocean ecosystem services. Science, Vol 314 - 787-790

jeudi 17 juin 2010

BP, Oiseaux mazoutés et éthique


Depuis le 20 Avril dernier, des milliers de barils de pétrole s'échappent chaque jour dans la baie du Mexique (aujourd'hui l'estimation est à 60 000/jour), en faisant la pire catastrophe pétrolière de l'histoire et certainement l'un des pires drames écologiques de notre ère.


Le symbole le plus communément utilisé pour alerter la population sur l'horreur de la marée noire, c'est l'oiseau mazouté. Et pourtant, il y a quelque jour j'ai lu un article dans Rue89 qui m'a pour le moins interpellée : "Oiseaux mazoutés : « Tuez-les, ne les nettoyez pas »". La phrase en question a été prononcée par Silvia Gaus biologiste au Wattenmeer National Park.

Voici un extrait de l'article :

"Alors qu'un hôpital à Fort Jackson en Louisiane a ouvert pour soigner les oiseaux les plus touchés par les nappes de pétrole, la biologiste relativise dans le Spiegel l'efficacité des actions de nettoyage des animaux mazoutés :

« Selon une étude sérieuse, le taux de survie des oiseaux mazoutés est de 1% à moyen terme. »

Démazouter un oiseau est une longue procédure, qui compte plusieurs étapes, dont l'avant-lavage. Ceci consiste à administrer, à l'aide d'une sonde, du charbon actif et de l'argile directement dans l'estomac. Un acte inefficace si l'on en croit la biologiste allemande :

« Leur faire ingérer des solutions à base de charbon, comme le Pepto Bismol, pour contrer la toxicité du pétrole, ne sert à rien.

Les oiseaux risquent de mourir de toute façon à cause de lésions au foie et aux reins. »"


Même si les chiffres annoncés par la biologiste sont plus ou moins discutés par d'autres spécialistes, le but de mon papier ici ne va pas être de discuter ces chiffres, mais plutôt de faire le point sur la situation éthique dans laquelle nous nous trouvons.

Voici comment je vois les choses. Des êtres humains, éminemment irresponsables, ont provoqué une catastrophe sans précédent ayant coûté la vie à onze personnes et à des milliers (et certainement plus) d'êtres vivants. Le calvaire que vivent ces oiseaux n'est qu'un exemple parmi tant d'autres de l'horreur engendrée par une telle catastrophe.
Et parce que le taux de survie des oiseaux traités ne serait que d'1%, certaines personnes décident qu'il serait mieux de les tuer? Mais même si le processus coûte cher, et même si c'est compliqué etc etc, n'est-ce pas le moindre que nous puissions faire?

La responsabilité est la nôtre, et uniquement la nôtre. Et nous avons l'occasion de sauver quelques vies et d'essayer de réparer même un peu les dégâts de la catastrophe. Alors éthiquement, avons nous le droit de nous dédouaner de cet effort?



Je n'ai pas bloggé plus tôt sur le drame de BP car il s'agit typiquement d'un drame qui me sort de mes gonds. L'attitude de l'entreprise, du gouvernement américain et des actionnaires représentent tout ce qui me révolte le plus sur cette Terre. Toutes les décisions prises jusqu'ici ont été à l'encontre de tout bon sens scientifique. L'usage à outrance de dispersant hyper toxique, l'idée de brûler le pétrole en surface, ne pas fournir des moyens suffisants pour protéger les côtes, etc etc. Même si moi même je me destine à faire de la restauration des écosystèmes, voir tout ça me décourage tous les jours un peu plus dans ma tâche.

J'espère sincèrement, en bisounours écologiste que je suis (c'est comme ça qu'un de nos profs de master nous appelle) , que les gens seront plus raisonnables et plus sages à l'avenir. J'espère un jour qu'on aura pas besoin d'une catastrophe pour commencer à légiférer, et j'espère qu'un jour les gouvernements et les individus penseront au long terme avant le court terme.


Voilà, c'était mon petit coup de gueule du jour !

A bientot pour un sujet de sciences pur et dur !